Enduits dégradés en soubassement
La pathologie
Les murs des constructions anciennes de la région présentent très couramment ces signes : un enduit décollé, effrité, décroûté, dégradé ; des joints dégradés entre les moëllons qui constituent le mur, s'écoulent sous forme de sable. Cela arrive sur une hauteur allant jusqu'à 1,50 à 2,00 mètre en partant du sol.
Outre l'aspect esthétique dégradé, ces désordres mettent en cause la solidité du mur, sa pérennité, et aussi son étanchéité : ici les pierres ne sont plus scellées, leurs joints sont largement dégarnis, la stabilité du mur est compromise.
Ici l'enduit du soubassement a été refait : l'enduit initial a pourtant poursuivi sa dégradation au-dessus.
Ces désordres sont le plus souvent accompagnés de taches blanches, d'efflorescences : le "sel de pierre", le salpêtre.
L'origine des désordres : les remontés capillaires, les rejaillissements
Ces murs de maçonnerie de moëllons calcaires et grès sont "naturellement" sujets aux remontés capillaires, par les joints, par les pierres elles-mêmes. Certains calcaires comportent énormément de vide entre leurs grains (les "pleins") : l'eau y circule facilement. La pierre de Vers (les carrières à côté du Pont-du-Gard) a une porosité ouverte de 32 %, par exemple, mais la championne reste le tuffeau parisien qui peut dépasser 60 % !
Les joints, le remplissage fait entre les pierres, eux-aussi, présentent une porosité plus ou moins marquée.
L'eau présente dans le sol remonte par capillarité dans le mur, et ressort du mur en emportant les sels minéraux de la pierre, des joints. Ce "décharnement" de la pierre la rend encore plus poreuse... et fragile. Les sels minéraux sont la "colle" qui maintient solidaires les grains de la pierre.
Autre cause de dégradation : les rejaillissements d'eau de pluie qui tombe au sol. Une goutte qui est projetée sur un mur ne fait pas beaucoup de dégâts, mais l'action répétée suffit à éroder l'enduit, puis les joints et les pierres.
L'action combinée des deux causes est redoutable, le mal accentuant le mal : l'enduit sert aussi (surtout ?) à rendre le mur imperméable.
Les remèdes préventifs
• A la construction ou à la reconstruction, placer une barrière qui coupe la capillarité. Par exemple utiliser en soubassement plutôt des "pierres froides", c'est à dire des pierres peu poreuses.
• Créer un enduit plus épais en soubassement : plus solide, plus étanche. Cette surépaisseur doit être réalisée à l'aide d'un chanfrein, pour pouvoir évacuer les eaux qui ruissellent sur le mur.
En illustration ci-contre, un enduit particulièrement bien pensé et exécuté : aujourd'hui abîmé mais il remplit encore sa fonction, malgré ses 70 ou 80 ans !
• Attention à ne pas être complètement étanche : le mieux est de construire un enduit "perspirant", c'est à dire qui est perméable dans le sens intérieur vers extérieur, et étanche dans le sens extérieur vers intérieur. Le mur doit pouvoir "respirer", il doit pouvoir évacuer l'eau qu'il contient. L'enduit idéal de ce point de vue est à la chaux - le ciment doit être rigoureusement exclu ! La chaux aérienne (CAEB) reste le meilleur choix.
• Créer un trottoir autour du bâtiment, une pente vers l'extérieur, pour éviter les eaux d'infiltration au bas des murs.
• Dans le même ordre d'idée, les gouttières qui recueillent l'eau pluviale et l'évacuent plus loin sont recommandées.
• Le drainage au pied des murs est possible... s'il est bien réalisé. Dans le cas contraire il peut avoir l'effet inverse !
• Le badigeon traditionnel (une "peinture" au lait de chaux) a l'avantage de renouveler la couche protectrice extérieure de l'enduit, peu coûteux, perspirant, il peut être coloré.
Les remèdes curatifs
• Lorsque l'enduit est trop dégradé, il faut le refaire. Piquer toutes les parties qui adhèrent mal, brosser (à sec !) les joints, les refaire soigneusement. Refaire un enduit traditionnel à la chaux, en surépaisseur de l'enduit conservé au-dessus, avec un chanfrein. Certains incorporent dans cet enduit de la pouzzolane qui permet, par sa structure poreuse de réguler le transit de l'eau, et donc ralentir la migration des sels minéraux.
• Un badigeon appliqué sur un enduit qui commence à être abîmé peut ralentir sa dégradation, en le "nourrissant" en surface.
• Créer un trottoir autour du bâti, pente vers l'extérieur.
• Poser des gouttières si elles n'existent pas.